Le désert d'Atacama est une région magnifique truffée de paysages à couper le souffle, mais ce que le voyageur en quête de belles images ignore souvent, c'est que ce désert est aussi le lieu où s'est développé le peuple atacamène. Bien avant l'arrivée des conquistadores espagnols, l'histoire de ses habitants s'est jouée dans les canyons et les oasis qui accueillent aujourd'hui les touristes du monde entier.

 

Dans la même série, nous vous invitons à lire les articles suivants :

- Histoire Atacamène : prélude

- Histoire Atacamène : les premiers chasseurs - cueilleurs (10 000 - 5 000 av JC)

- Histoire Atacamène : les précurseurs de la culture atacamène (5 000 - 1 000 av JC)

- Histoire Atacamène : l'apogée culturelle atacamène (1 000 av - 400 ap JC)

 

Depuis l'époque des premiers chasseurs-ceuilleurs, les Atacamènes sont en contact avec leurs voisins : les peuples de la côte pacifique, ceux du nord-ouest argentin et du sud Lipez. Avec la domestication des camélidés et l'apparition des lamas, les caravanes de troc vont parcourir la zone, intensifiant ainsi les échanges de biens, de ressources mais aussi d'idées entre les différentes etnies de la région. A partir du Vème siècle de notre ère, les communautés atacamènes du salar d'Atacama vont recevoir, à travers les caravanes de lamas et les échanges commerciaux, l'influence d'un de leurs lointains voisins : le peuple Tiwanaku.

Illustration Augustin Llagostera - "Los antiguos habitantes del Salar de Atacama"

Illustration Augustin Llagostera - "Los antiguos habitantes del Salar de Atacama"

La civilisation Tiwanaku

Tiwanaku, Tiahuanaco, Tiawanaco... Les orthographes divergent mais l'idée reste la même : au début de notre ère, sur les rives méridionales du lac Titikaka, des cultures Chiripa, Wankarani et Pukara va naître une civilisation qui va rayonner dans le sud des Andes centrales pendant plus de 600 ans.

La civilisation Tiwanaku va connaître un essort jamais égalé à cette époque dans cette partie du monde grâce à ses techniques agricoles : les camellones (ou waru waru) vont leur permettre de produire d'importantes quantités de nourriture, pour nourrir la population locale bien sûr, mais les excédents de production vont également leur permettre de dévellopper un immense réseau de contacts et d'échanges. Grâce à cet ample réseau, ils vont considérablement diversifier leurs ressources mais vont également pouvoir étendre leur influence, notamment culturelle et religieuse.

Schéma d'agriculture par camellones.

Schéma d'agriculture par camellones.

A 400 ap JC, la civilisation Tiwanaku englobe une bonne partie des abords du lac Titikaka, et commence son expansion macro-régionale : en installant des colonies (sur la côte pacifique près de l'actuelle ville d'Arica au nord du Chili - au sud du Pérou actuel - dans la selva bolivienne du côté de Cochabamba), mais également en établissant des liens forts avec des contrées plus éloignées, comme par exemple le désert d'Atacama.

A la moitié du premier millénaire de notre ère, les Tiwanaku répandent leur iconographie, leurs pratiques rituelles et leur artisanat à travers leur réseau d'échanges et de commerce.

Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl
Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl

Photos Musée Précolombien de Santiago : www.precolombino.cl

La "cité impériale"

En parallèle de cette expansion régionale, la cité centrale des Tiwanaku va se développer. On estime qu'elle a pu compter entre 20.000 et 50.000 habitants, sans compter les territoires alentours consacrés à l'agriculture et à l'élevage.

Pyramides, statues monolithiques, temples, palais, etc... Les ruines encore visibles aujourd'hui témoignent de la puissance de cette civilisation, de la parfaite maîtrise du travail de la pierre qu'avait acquise les Tiwanaku et de l'importance du religieux dans l'excercice du pouvoir de cette civilisation théocratique.

 

Reconstruction idéale d'une partie de la cité Tiwanaku (source : abakmatematicamaya.blogspot.com)

Reconstruction idéale d'une partie de la cité Tiwanaku (source : abakmatematicamaya.blogspot.com)

Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).
Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).
Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).
Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).
Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).
Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).
Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).
Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).
Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).

Ruines du site archéologique de Tiwanaku (Photos : Eldesiertoflorido).

La connexion Tiwanaku  > Salar d'Atacama

Les débats sont encore vifs entre les archéologues pour déterminer quelle a été la nature exacte de la connexion entre la civilisation Tiwanaku et le peuple atacamène : les oasis du bord du salar d'Atacama ont-ils hébergé une colonie Tiwanaku ? Les Atacamènes, connectés depuis des milliers d'années avec leurs voisins, représentaient-ils un carrefour particulièrement important dans le réseau d'échange Tiwanaku ? Ou les habitants du salar d'Atacama étaient-ils tout simplement des partenaires commerciaux comme tant d'autres ?

La question reste ouverte, mais une chose est certaine, l'influence culturelle et religieuse Tiwanaku a très fortement pénétrée la culture atacamène pendant plus de 5 siècles.

Vases rituelles en métal, en bois ou en céramique (kerros), textiles, objets de métaux précieux et ustensiles rituels ont été retrouvés dans les tombes des personnages de plus haut rang de l'époque. Être en contact avec les Tiwanakus et recevoir des présents "diplomatiques" semblait être l'un des marqueurs de statut les plus important pendant cette période.

Photos de quelques pièces Tiwanaku retrouvées dans les environs de San Pedro d'Atacama - Collection du musée archéologique Gustavo Le Paige - photos : Nicolas Aguayo
Photos de quelques pièces Tiwanaku retrouvées dans les environs de San Pedro d'Atacama - Collection du musée archéologique Gustavo Le Paige - photos : Nicolas Aguayo
Photos de quelques pièces Tiwanaku retrouvées dans les environs de San Pedro d'Atacama - Collection du musée archéologique Gustavo Le Paige - photos : Nicolas Aguayo
Photos de quelques pièces Tiwanaku retrouvées dans les environs de San Pedro d'Atacama - Collection du musée archéologique Gustavo Le Paige - photos : Nicolas Aguayo
Photos de quelques pièces Tiwanaku retrouvées dans les environs de San Pedro d'Atacama - Collection du musée archéologique Gustavo Le Paige - photos : Nicolas Aguayo
Photos de quelques pièces Tiwanaku retrouvées dans les environs de San Pedro d'Atacama - Collection du musée archéologique Gustavo Le Paige - photos : Nicolas Aguayo

Photos de quelques pièces Tiwanaku retrouvées dans les environs de San Pedro d'Atacama - Collection du musée archéologique Gustavo Le Paige - photos : Nicolas Aguayo

On sait également que les pratiques rituelles liées à la consommation de produits halucinogènes vont évoluer : alors que les Atacamènes consommaient jusque là des plantes halucinogènes en les fumant dans des pipes, ils vont adopter les pratiques inhalatoires des Tiwanaku et l'ensemble des objets associés à ce rituel (mortiers, spatules, tablettes, tubes d'inhalation, etc...). Au point qu'un style "local" de ces mêmes objets va apparaître dans la région - stade ultime de l'appropriation locale d'une influence extérieure !

Exemples de tablettes d'inhalation de style local atacamène - "Los antiguos habitantes del Salar de Atacama" de Augustin Llagostera

Exemples de tablettes d'inhalation de style local atacamène - "Los antiguos habitantes del Salar de Atacama" de Augustin Llagostera

A la fin du premier millénaire, la civilisation Tiwanaku va commencer à décliner : conflits internes, problèmes climatiques ou affrontements avec les etnies voisines, là encore, les scientifiques ne parviennent pas à établir avec certitude la ou les raisons de la décadence des Tiwanaku. Toujours est-il que parallèlement à ce déclin, l'influence des Tiwanaku dans la région va peu à peu diminuer jusqu'à disparaitre complètement.

Dans le bassin du salar d'Atacama, une nouvelle ère s'ouvre : celle des "seigneurs" atacamènes et du développement régional...

 

Tag(s) : #Histoire

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