Le Chili vous secoue ! Ca pourrait être un slogan d'office de tourisme, genre « la montagne, ça vous gagne », sauf que dans ce cas, il vous faudra prendre cette phrase au pied de la lettre : le Chili est l'un des pays les plus sismiques au monde.

 

Placé sur la ceinture de feu du Pacifique, le Chili subit les conflits telluriques des plaques tectoniques qui l'entourent : les plaques Nazca, Sud Américaine, Antarctique et Scotia.

 

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Le problème majeur vient de Nazca (et dans une moindre mesure de la plaque Antarctique) qui, comme expliqué ici, a une tendance à aller de l'avant malmenant au passage la plaque continental Sud Américaine, et donc le Chili.

 

C'est ce phénomène de subduction qui est à l'origine de l'activité sismique chilienne.

 

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La plaque de Nazca, en glissant de 7 à 9 cm par an sous la plaque Sud Américaine, provoque des frictions sur toute la zone de contact. Evidemment, des frictions à l'échelle de la croûte terrestre, ce ne sont pas des guiliguilis entre cailloux, on parle ici de quelques uns des plus importants tremblements de terre de l'histoire de la sismologie.

 

 

La Sismologie

Même si les hommes observent et tentent d'expliquer les tremblements de terre depuis la nuit des temps, ce n'est qu'au milieu du 19e siècle que les bases scientifiques de la sismologie vont être posées : études de la propagation des ondes, délimitation des zones sismiques, tectoniques des plaques, invention d'outils performants pour mesurer l'intensité des secousses, études géologiques, etc...

 

Aujourd'hui on connaît les causes des séismes et leur fonctionnement, on peut évaluer leurs effets, on peut en mesurer la puissance, mais on ne peut toujours pas les prévoir avec précision et, même dans les zones à très hauts risques, les solutions censées protégées les populations des dégâts qu'ils provoquent sont soit inexistantes, soit insuffisantes.

 

 

Les causes

Quatre types de séisme ont été identifiés :

- les séismes tectoniques : les plus fréquents et les plus dévastateurs. Ils sont dus à l'activité des plaques tectoniques.

- les séismes volcaniques : ils sont engendrés par la vibration produite par la remonté du magma, du gaz et des blocs solides dans la cheminée d'un volcan.

- les séismes polaires : les glaciers présentent une certaine élasticité. Quand la couche de glace fond ou quand elle se rompt, ils relâchent la tension accumulée.

- les séismes artificiels : sont liés à l'activité humaine (extraction minière, explosions, barrage, etc...)

 

Dans le cas du Chili, ce sont les séismes tectoniques qui sont en cause.

(Ndlr : Quoiqu'en y regardant de plus près, il y a aussi des centaines de volcans, l'antarctique pas très loin et une activité minière soutenue... Mais sinon, c'est sympa le Chili, venez nous voir !)

 

 

Le fonctionnement des séismes tectoniques

Quand deux plaques sont en contact soit elles se confrontent et forment une chaine de montagne (par exemple l'Himalaya), soit elles s'écartent, soit elles glissent l'une contre l'autre ou l'une sous l'autre.

Le mouvement entre les plaques peut de faire sans encombre (entendez par là que les secousses sont trop minimes pour qu'on les perçoivent). Mais, quand le mouvement naturel entre deux plaques est bloqué, l'énergie de ce mouvement se concentre le long de la zone de contact. Elle peut ainsi s'accumuler pendant des années, voire des siècles, mais quand la force accumulée est trop importante, le blocage cède en libérant la tension et l'énergie emmagasinées.

 

Imaginez que vous êtres tranquillement en train de fermer la fermeture éclair de votre manteau et qu'elle se bloque : vous allez continuer à forcer, et quand ça va lâcher vous allez très logiquement vous prendre votre propre main dans la figure... C'est un peu la même idée.

 

C'est à l'endroit de la rupture que l'on situe le foyer du tremblement de terre.

 

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Image: www.donnees.paca.developpement-durable.gouv.fr

 

La puissance de chaque séisme est indiquée par sa magnitude, c'est à dire l'énergie libérée à l'endroit de son foyer, indiquée sur l'échelle de Richter (du nom du scientifique américain qui l'a inventée en 1935).

Cette échelle est exponentielle et entre chaque échelon, la puissance est multipliée par 10. Imaginons que le niveau 1 corresponde à une puissance de 1, le niveau 2 correspondrait à une puissance de 10, le niveau 3 à une puissance de 100, le niveau 4 à une puissance de 1000, etc.

 

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Image : assistancescolaire.com

 

On dit de l'échelle de Richter qu'elle est ouverte, parce qu'en fait il n'y a pas de maximum. On peut très bien imaginer un mega-séisme dont la puissance pourrait atteindre 12 sur l'échelle de Richter, mais dans ce cas, il n'y aurait plus personne pour noter les effets correspondants.

A titre indicatif, voici les quelques correspondances qui pourront vous donner une idée de l'énergie libérée par un séisme :

- 1 sur l'échelle de Richter = 1 kg d'explosif

- 2 sur l'échelle de Richter = explosion d'une mine antipersonelle 

- 4 sur l'échelle de Richter = une tornade

- 6  sur l'échelle de Richter = 1 bombe A = Hiroshima

- 8 sur l'échelle de Richter = 25 000 bombes A

- 9 sur l'échelle de Richter = 33 000 bombes A 

 

 

Les effets

La force d'un tremblement de terre est enregistrée en surface par un outils de mesure appelés sismographe. Les stations de mesure jalonnent les zones à risque pour que les sismologues, en compilant les données de chaque secousse, puissent envisager les différents scénarios possibles des séismes à venir.

Si la quantité d'énergie libérée au niveau du foyer est importante voire colossale, les effets en surface peuvent être moindre. En effet, la magnitude n'est pas forcément un bon indicateur puisque la profondeur du foyer, la durée de la secousse, sa fréquence et surtout la distance entre l'épicentre et l'endroit qui vous intéresse sont aussi à prendre en compte.

C'est pourquoi aujourd'hui, c'est l'échelle modifiée de Mercalli (du nom du scientifique italien qui l'a inventée en 1883) ou Echelle MSK (version readaptée de l'échelle précédente créée conjointement par Medvedev-Sponheuer-Karnik en 1998) qui est le plus souvent utilisée.

 

Cette échelle rend compte de l'intensité et donc des effets d'un tremblement de terre. Plus on s'éloigne de l'épicentre moins les effets seront importants d'où l'intérêt d'utilisé cette échelle relative qui témoigne davantage des conséquences sur les populations à un endroit donné.

 

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Image IRNS

 

Par exemple, concernant le tremblement de terre du 23 août dernier, la magnitude était de 5,7 c'est à dire quasiment 6, et dans ce cas l'échelle de Richter indique : dégâts à l'épicentre dont l'ampleur dépend de la qualité des bâtiments. Objectivement, on a de quoi avoir un peu peur avec nos maisons en adobe ou en parpaings mals joints.

Sauf qu'à San Pedro de Atacama il était classé IV sur l'échelle de Mercalli, juste de quoi faire trembler les fenêtres et réveiller ceux dont le sommeil est le moins lourd. A Calama, plus proche de l'épicentre, c'était V.

 

 

L'activité sismique au Chili

Revenons à nos lamas : les séismes au Chili.

Ici et là on entend que le Chili est l'un des pays les plus sismiques au monde. Il n'y a pas vraiment de statistiques exactes qui permettent de savoir qui gagne le concours, ceci étant dit, de nombreuses données viennent étayer cette affirmation.

 

Dans l'histoire de la sismologie, le Chili bat quelques records, notamment celui du plus puissant séisme jamais enregistré : le séisme de Valdivia ou séisme de 1960 a eut lieu le 22 mai dans le sud du Chili et a atteind une magnitude de 9,5 sur l'échelle de Richter.

 

esacademic.com

esacademic.com

 

4 des séismes de puissance égale ou supérieur à 8,0 sur l'échelle de Richter enregistrés depuis 1 900 sont Chiliens.

Toujours depuis l'année 1 900, 78 séismes d'une puissance égale ou supérieur à 7 sur l'échelle de Richter ont été enregistré au Chili.

 

Certains guides d'ici racontent qu'il y a en moyenne 30 secousses par jour au Chili, la plupart de puissance 1 dont détectables uniquement par les sismographes. Histoire de vérifier, j'ai fait quelques recherches et si je n'ai pas réussi à confirmer cette information, je suis tombé sur un site particulièrement anxiogène (dont je tairai l'adresse pour éviter que les Mômans trop éloignées ne s'inquiètent) qui recence jour par jour les secousses de plus de 3 sur l'échelle de Richter enregistrées dans le pays. 

Quelques exemples :

- le 15 août 2013 > 17 secousses égales ou supérieures à 3

- le 14 juillet 2013 > 15

- le 1er janvier 2013 > 18 

 

Du coup dans la vie de tous les jours, ici, ça n'a rien d'exceptionnel. Quand la terre a tremblé il y a toujours quelqu'un qui vous demandera si vous avez senti, mais ça ne prend pas plus d'importance que si on parlait de la pluie ou du beau temps.

D'ailleurs les Chiliens savent relativiser. Il existe deux mots pour parler d'une secousse sismique : le tremblor qui désigne une secousse inférieure à 7 et le terremoto pour les séismes de 7 et plus, ceux qui commencent à faire des dégâts.

 

Ils savent que des villes ont été rasées, que des parties côtières se sont enfoncées sous l'eau, que la géographie de leur pays a été modifiée parfois en quelques secondes, mais surtout ils savent que ça se reproduira et qu'ils n'y peuvent rien.

D'autant que le Chili cumule les désavantages. La zone de contact en la plaque de Nazca et la plaque Sud Américaine est dans le Pacifique. Si la rupture a lieu dans la partie immergée de cette zone, il y a de bonnes chances pour que l'onde sismique entraine la formation d'un raz de marée (ou maremoto en chilien). C'est le deuxième effet KissKool et généralement c'est le plus destructeur.

 

En 1 960, le "tsunami" a atteind les côtes chiliennes 15 minutes après la secousse, inondant par exemple toute la ville de Valdivia, puis s'est propagé dans tout le Pacifique ravageant les côtes d'Hawai et du Japon notamment.

En 2010, lors du tremblement de terre du 27 février, c'est encore une fois le tsunami qui a fait le plus de ravages au Chili mais aussi l'ensemble de la Polynésie Française.

 

 

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Le seul avantage du Chili face à ces catastrophes naturelles c'est sa faible densité démographique : 21 habitants au kilomètre carré, la moitié du pays est quasiment désertique.

Le problème qu'est en train de se créer le Chili est la concentration de sa population dans la région métropolitaine (Santiago au centre du pays) et sur la côte.

 

80 % de la population vit dans la région centrale, c'est à dire sur 1 000 km entre la Serena au nord et Conception au Sud, coincée entre le Pacifique et la Cordillère des Andes, dans une zone qui a déjà connu de nombreux tremblements de terre majeurs dont 3 des plus destructeurs : 

- 1906 à Valparaiso > magnitude 8,2 > 20 000 morts,

- 1939 à Chillan > magnitude 8,3 > 28 000 morts,

- 2010 à Concepcion > magnitude 8,8 > 500 morts.

 

Le dernier accident tellurique en 2010 à rappeller aux autorités des failles de son système d'arlerte et la faiblesse de ses moyens d'interventions. La prise de conscience suit son chemin et si les normes de constructions anti-sismiques sont généralisées, l'urbanisation croissante des zones côtières pose problème en terme d'évacuation et de secours.

 

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Photo de la rédaction

 

C'est ainsi que, depuis 2010, l'on voit fleurir dans toutes les villes côtières des panneaux indiquant les risques de marremoto et les voies d'évacuation. 

Autre exemple : en mars 2011 lors de l'alerte Tsunami lancée après le séisme de Tohoku (Fukushima), toute la côte chilienne - soit 6 435 Km - a été évacuée. Ce jour là, aucune vague gigantesque n'a déferlé sur la pays, mais l'exercice a sans doute été bénéfique pour les années à venir. On prédit au Chili en moyenne un séisme de 8 et plus tous les 10 ans !

 

Pour terminer sur une note plus festive et pour vous prouver si l'en était encore besoin que les Chiliens relativisent, voici deux recettes de cocktail que vous pourrez siroter face au Pacifique lors d'un de vos voyages au Chili !

 

El Terremoto (tremblement de terre)

Inventé en 1985 dans un bar de Santiago après le séisme de Valparaiso d'une magnitude de 7,8 - C'est aujourd'hui une des boissons alcolisées nationales du Chili

Mélangez du vin blanc, une touche du Pisco, un filet de sirop de grenadine et une boule de sorbet à l'ananas (rajouter du sucre selon vos goût) et c'est prêt !

 

 

La Replica (la réplique : secousse secondaire qui suit le séisme principale)

C'est un Terremoto dans un verre plus petit.

 

 

El Maremoto (raz de marée)

Très logiquement, il doit être bu juste après le Terremoto et la Replica.

Mélanger du vin blanc, du jus d'abricot, un filet de sirop de grenadine et une boule de sorbet à l'ananas.

 

Evidemment les recettes varient selon les bars, mais l'idée est là : une fois que vous aurez bu tout ça, normalement, vous ne remarquerez plus du tout si la terre tremble, du coup vous épargnerez vos nerfs à défaut d'épargnez votre foie !

 

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minuevohogar.cl

 

 

A la vôtre ! 

 

 

 

Préparez-vous à trembler ! (le Chili sismique)
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